La Mauritanie s'engage à faire entendre la voix de l'Afrique à travers le monde
Son Excellence Madame Khadija M'barek Fall présente les priorités de la présidence mauritanienne de l'Union africaine.
Alors que la Mauritanie assure la présidence de l'Union africaine (UA), le Rapport sur le CPS a sollicité l'avis de Son Excellence Madame Khadija M'barek Fall, ambassadrice de la république islamique de Mauritanie auprès de la république fédérale démocratique d'Éthiopie et représentante permanente auprès de l'UA.
La Mauritanie s'est vu confier la présidence de l'UA lors du 37e sommet de l'organisation en février 2024. Quelles sont vos priorités pour cette mandature ?
En assumant cette 22e présidence de l'UA sous la houlette de S.E. Mohamed Ould Cheikh Ghazouani, président de la République islamique de Mauritanie, nos principales priorités sont la sécurité, l’éducation, la santé, la digitalisation, la souveraineté alimentaire et les changements climatiques. Ces sujets requièrent l'attention urgente du continent.
Avec la récente admission de l'UA au G20, la présidence mauritanienne de 2024 devra concilier la gestion des crises continentales et le renforcement de la position de l'Afrique dans le monde. Les stratégies de la Mauritanie pour répondre à ces deux priorités concomitantes reposeront sur les efforts déployés pour faire entendre la voix de l'Afrique dans le monde, tout en s'attaquant aux causes de l'insécurité. Personnellement, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas atteindre cet objectif.
La Mauritanie doit concilier gestion des crises et renforcement de la position mondiale de l'Afrique
Comment la Mauritanie perçoit-elle le projet de réforme de l'architecture africaine de paix et de sécurité (APSA) et comment entend-elle y contribuer ?
Cette réforme est impérative pour garantir l'efficacité et le succès de l'APSA, comme l'a souligné le président Ghazouani lors du sommet dans son discours inaugural. Vous savez que I’UA est engagée dans un processus de réforme institutionnelle, piloté hier par S.E. Paul Kagamé, président du Rwanda, et aujourd’hui par S.E. William Ruto, président du Kenya. Nous espérons que l’APSA trouvera sa place dans cette réforme.
Notre ministre secrétaire général de la présidence de la République, Moulaye Ould Mohamed Laghdhaf, a récemment représenté le président de l’UA, S.E. Mohamed Cheikh El Ghazouani aux activités du 21e anniversaire du CPS à Dar-es-Salam en Tanzanie. Le thème de l'événement était « 20 ans du CPS de l'UA en tant qu'organe décisionnel permanent : les deux prochaines décennies de la paix et de la sécurité que nous voulons en Afrique ». Les discussions ont porté sur l'état de la paix et de la sécurité sur le continent et sur les solutions possibles. Laghdhaf a exprimé le souhait de la présidence mauritanienne de voir l'APSA jouer pleinement son rôle en faveur de la paix et de la sécurité en Afrique. Nous continuons donc à encourager toutes les parties prenantes à s'engager dans la révision prévue de l'APSA afin de renforcer le CPS et d'améliorer son rôle dans la prévention et la gestion des conflits.
Nous encourageons les parties prenantes à réviser l'APSA afin de renforcer le rôle du CPS
Comment la Mauritanie perçoit-elle la réponse de l'UA au terrorisme et aux changements anticonstitutionnels de gouvernement dans la région et dans l'ensemble de l'Afrique ?
Depuis des décennies, l'instabilité du Sahel, région dont la Mauritanie fait partie, est exacerbée par les multiples changements anticonstitutionnels de gouvernement et la propagation du terrorisme. Malheureusement, les ingérences et les interventions extérieures sont venues entraver les instruments mis en place par les États membres du Sahel pour lutter contre ces fléaux. La force conjointe d'autodéfense du G5 Sahel, par exemple, a été confrontée à de nombreux défis.
La Mauritanie, heureusement, pays de stabilité entretenant de bons rapports avec tous les pays frères de la région, dispose d’atouts réels pour promouvoir la concorde et l’entente entre ces nations et la CEDEAO et les partenaires au développement. Il est donc essentiel de mettre l'accent sur le renforcement de la solidarité africaine envers les pays sahéliens menacés par le terrorisme. Il est inacceptable, en Afrique, de voir la maison du voisin brûler sans l'aider à éteindre l’incendie.
L'Afrique souhaite la mise en place de partenariats authentiques fondés sur des avantages mutuels
Les principaux défis liés au rôle de président de l'UA portent sur les ressources et la coordination au sein du Bureau. Comment les partenaires peuvent-ils aider la Mauritanie à les relever ?
Les partenaires peuvent et doivent aider de deux manières. La première, et la plus essentielle, est de s’abstenir de toute ingérence intérieure dans les affaires de l’UA. La deuxième est d’accorder les supports financiers à la réalisation des priorités susmentionnées selon une logique gagnant-gagnant. Il ne s’agit pas d’une assistance car, dans notre philosophie, l’Afrique n’est pas dans un esprit de demande de charité. Nous souhaitons plutôt des partenariats authentiques et bénéfiques avec toutes les parties prenantes, fondés sur des relations mutuellement bénéfiques ou donnant-donnant.
Des inquiétudes concernant le mandat limité à un an ont émergé au sein de l'UA. Quel est le point de vue de la Mauritanie sur la durée de la présidence de l'UA ?
Il n’existe pas de règles absolues en la matière. L’Union européenne, par exemple, a opté pour des mandats de six mois. Un mandat d’un an, tel que retenu par l’Union Africaine, me parait convenable. En réalité, I’importance ne réside pas dans la durée du mandat, mais dans ce qu’on veut y faire et comment on Ie fait. Et c’est sur cela, que nous nous concentrons.