En RDC, la force militaire l’emporte sur la médiation
Malgré une coalition militaire montante, le président Tshisekedi peine à vaincre les rebelles du M23 dans l’est du pays.
lgré une grande coalition de forces militaires diverses, la République démocratique du Congo (RDC) continue de subir des revers dans l’est du pays, où les rebelles du M23 bénéficient d’un soutien important du Rwanda.
Selon un récent rapport du groupe d’experts des Nations Unies, entre 3000 et 4000 soldats rwandais ont combattu aux côtés du M23 en RDC et Kigali exerce un « contrôle de facto » sur le groupe. Ce rapport indique également que l’Ouganda a soutenu le M23. Le Rwanda et l’Ouganda nient tous deux ces allégations.
Quatre ans après l’ouverture de cet ultime chapitre de la guerre, de nombreuses forces se sont retirées alors que les rebelles du M23 progressent dans la province du Nord-Kivu. Ces forces comprennent la Brigade d’intervention de la force de la Mission de stabilisation de l’Organisation des Nations Unies en RDC (MONUSCO) et, plus récemment, la Mission de la Communauté de développement de l’Afrique australe en RDC (SAMIDRC), les Wazalendo (une coalition de milices locales), des mercenaires d’Europe de l’Est engagés par Kinshasa, des contingents burundais et des milices des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda.
Cette semaine, Bintou Keita, Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour la RDC et cheffe de la MONUSCO, a fait part au Conseil de sécurité des Nations Unies de sa vive inquiétude face à la progression rapide du M23. Elle a déclaré qu’au cours des deux dernières semaines, le M23 s’était emparé de sites stratégiques dans le Nord-Kivu, notamment la ville de Kanyabayonga dans les territoires de Lubero et de Rutshuru, et qu’il avançait vers le Sud-Kivu.
La SAMIDRC, censée redonner espoir, est mal équipée et inefficace
Bintou Keita a averti que « l’escalade rapide de la crise du M23 comporte le risque très réel de provoquer un conflit régional plus large ». Elle a noté que « l’escalade de la violence dans l’est du pays continue de provoquer des déplacements massifs de population, aggravant encore une situation humanitaire déjà épouvantable ». Environ 7,3 millions de personnes dans le pays ont déjà été déplacées, la plupart dans l’est du pays.
La SAMIDRC, en particulier, censée restaurer l’espoir dans l’est de la RDC, est sous-équipée et inefficace. Depuis son arrivée par contingents depuis le 15 décembre, elle a subi de lourdes pertes principalement dues aux tirs de mortiers du M23 (et probablement du Rwanda) depuis les collines sur ses camps dans la région de Sake, au nord-ouest de Goma, la capitale du Nord-Kivu.
Est de la RDC
Source : ISS
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Huit soldats sud-africains et trois soldats tanzaniens sont morts au combat depuis février, et de nombreux autres ont été blessés. La SAMIDRC devrait atteindre son effectif complet de quelque 4800 contingents dans le courant du mois.
L’Union nationale de défense sud-africaine s’est indignée, après la dernière attaque du M23 au cours de laquelle deux capitaines ont été tués, jugeant « inacceptable » qu’un décès soit dû à , un retard d’évacuation médicale. La mission manque cruellement d’hélicoptère, pour les évacuations médicales et le soutien aérien contre le M23.
La SAMIDRC souhaite reprendre la plupart des installations de la MONUSCO en partance
Les dirigeants de la SADC ont accepté la mission SAMIDRC l’année dernière à la demande du président de la RDC, Félix Tshisekedi, qui souhaitait contrer les contingents rwandais et vaincre définitivement le M23. Cependant, Stephanie Wolters, experte de la RDC et chercheuse principale à l’Institut sud-africain pour les Affaires internationales, a remis en question le bien-fondé de cette mission.
En particulier, l’Afrique du Sud a retiré ses forces du nord du Mozambique où elles combattaient des insurgés, faute de ressources nécessaires pour se battre sur les deux théâtres d’opérations. Wolters a également critiqué le fait qu’une solution politique au conflit avec le M23 soit relativement négligée.
L’autre question cruciale concernant la SAMIDRC est celle des finances. Jusqu’à présent, Kinshasa et Pretoria supportent la majeure partie des coûts, même s’ils aimeraient manifestement que les Nations Unies prennent le relais.
La MONUSCO a entamé son retrait de la RDC, prévu de se terminer d’ici la fin de l’année. La SADC souhaite reprendre la plupart de ses installations. En novembre 2023, la SADC a demandé officiellement au Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, le soutien des Nations Unies à la SAMIDRC, notamment en termes d’installations, d’équipements, de services, de moyens aériens, de soutien médical et de partage de renseignements. En mars, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a approuvé le déploiement de la SAMIDRC et l’appel au soutien des Nations Unies.
Tshisekedi et Kagame affichent leur puissance militaire, croyant pouvoir l'emporter par la force
Le 28 juin, le Secrétaire général a présenté un rapport proposant plusieurs options pour le soutien de la MONUSCO à la SAMIDRC. Ces options incluent l’échange de renseignements et la coordination entre les deux missions et un soutien complet des Nations Unies. Il s’agissait notamment du déploiement et de la rotation des contingents via un transport aérien stratégique, d’une capacité d’évacuation dédiée et d’un soutien médical, de consommables, de capacités de gestion de l’impact sur l’environnement et de contrats de maintenance des infrastructures. Ces propositions ont été discutées lors de la réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies de cette semaine, mais aucune décision n’a été prise.
Les États-Unis semblent pour leur part réticents à l’idée de transformer la MONUSCO en SAMIDRC, l’ambassadrice américaine aux Nations Unies ayant mis en garde contre un retrait prématuré de la MONUSCO. Elle a noté qu’après le retrait de la MONUSCO du Sud-Kivu en juin, les forces armées de la RDC ont lutté pour maintenir les positions occupées par les casques bleus. Elle a déclaré que le Conseil de sécurité ne devrait pas soutenir le départ de la MONUSCO des provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri (beaucoup plus instables) avant qu’elles ne soient stabilisées.
Elle a également vivement critiqué Kigali, déclarant que « les interventions et opérations militaires du Rwanda au Nord-Kivu sont allées au-delà d’un simple soutien aux opérations du M23 pour s’étendre à une implication directe et décisive ». Elle a soutenu la SAMIDRC et s’est félicitée de la trêve humanitaire temporaire du 5 au 19 juillet, apparemment négociée en grande partie par les États-Unis. Il n’y a cependant eu aucun signe visible indiquant que le cessez-le-feu pourrait déboucher sur une situation plus permanente.
Cette semaine, l’organe de sécurité de la SADC se réunit en Zambie pour discuter des performances de la SAMIDRC. Les processus de paix de Nairobi et de Luanda ne semblent guère progresser. On peut vraisemblablement enterrer le premier. Le second, théoriquement encore viable, appelle Tshisekedi et le président rwandais Paul Kagame à se rencontrer en personne pour résoudre les problèmes sous-jacents au conflit.
Mais aucun des deux dirigeants ne montre le moindre signe de volonté d’organiser cette rencontre. Au contraire, l’accent mis sur le renforcement de leur puissance militaire dans l’est de la RDC montre, tragiquement, qu’ils croient encore tous deux pouvoir l’emporter par la force.
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