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L’ISS propose une nouvelle approche des transitions militaires en Afrique de l’Ouest

Aller aux élections sans examiner les causes du coup d’État pourrait engendrer un gouvernement exposé à un nouveau renversement.

L’Institut d’études de sécurité (ISS) propose une nouvelle stratégie de réponse régionale et internationale aux changements anticonstitutionnels de gouvernement en Afrique de l’Ouest. Cette stratégie intervient à un moment clé pour la région.

En janvier, les gouvernements militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont annoncé leur retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette décision a mis en lumière les profondes difficultés auxquelles est confrontée la CEDEAO, engendrant ainsi une crise existentielle pour le bloc régional. Toutefois, ce retrait pourrait être l’occasion de réformer les processus de paix et de sécurité de la CEDEAO et de réviser ses instruments de lutte contre les violations commises par des gouvernements élus.

L’ISS invite à mieux comprendre les conditions qui donnent lieu à des coups d’État. L’Institut affirme que même sous des gouvernements militaires, il est important de soutenir le développement économique et l’aide humanitaire.

« Je salue l’analyse minutieuse de l’histoire et du contexte des changements anticonstitutionnels de gouvernement dans ce rapport », a déclaré Kyle O’Sullivan, directeur pour l’Afrique au ministère irlandais des Affaires étrangères. « Celle-ci nous incitera certainement à sortir des sentiers battus et à réfléchir aux leçons à tirer de l’histoire récente et des réponses apportées à l’échelle régionale et internationale, ainsi qu’à l’efficacité ou à l’inefficacité de ces réponses. »

Depuis 2021, l’Afrique de l’Ouest a été le théâtre de coups d’État au Mali, en Guinée, au Burkina Faso et au Niger. Les causes en sont la mauvaise situation économique, les retards en matière de développement, l’augmentation du taux de chômage et l’échec de la réforme du secteur de la sécurité. Les crises de gouvernance, les manipulations des constitutions et l’insécurité liée à la criminalité et au terrorisme y jouent également un rôle essentiel.

La condamnation rapide d’un coup d’État est la réponse habituelle des gouvernements régionaux et de la communauté internationale, suivie d’une demande de tenue d’élections à brève échéance et de retour à un gouvernement civil.

Les coups d’État se sont multipliés dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest. Lors des transitions précédentes au Burkina Faso, au Mali, au Niger et en Guinée, le pouvoir a été rendu à un gouvernement civil relativement rapidement – en moyenne 17 mois après le coup d’État. Dans la plupart des cas, cependant, les dirigeants nouvellement élus ont perdu le soutien de la population, ce qui a ouvert la voie à une nouvelle prise de pouvoir par les militaires.

L’ISS a organisé plus de 70 réunions pour informer les acteurs régionaux et internationaux

« C’est pourquoi il faut se concentrer davantage sur les défis structurels, les dynamiques internes et les enseignements tirés des transitions précédentes », déclare Fahiraman Rodrigue Kone, responsable du projet Sahel au sein du bureau régional de l’ISS pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel.

Il exhorte les gouvernements régionaux et internationaux à innover et à explorer d’autres moyens d’atteindre la stabilité. « Nous avons plaidé pour la mise en place d’institutions solides et d’un environnement social et économique propice à la stabilité future. »

Les gouvernements civils élus sont plus durables lorsque les conditions sont propices au développement et à la croissance, avec des investissements dans les domaines de la santé, de l’eau, de l’éducation et des infrastructures.

« Se précipiter vers de nouvelles élections sans tenir compte des causes des coups d’État pourrait aboutir à un gouvernement instable exposé à une nouvelle intervention militaire », déclare Kone. « Le retour à l’ordre constitutionnel reste l’objectif premier, mais il ne peut être le seul critère de réussite. »

L’approche de l’ISS a été présentée au Forum de Lomé sur la paix et la sécurité en octobre 2023 et au Conseil de sécurité des Nations Unies en janvier 2024. L’Alliance Sahel a invité l’ISS à faire part de son analyse des implications des coups d’État sur la coopération au développement lors d’un séminaire à Bruxelles.

L’équipe de recherche de l’ISS a organisé plus de 70 réunions d’information sur les transitions au Mali, au Niger, au Burkina Faso et en Guinée à l’intention des gouvernements de la région, du corps diplomatique et des organisations internationales.

L’ISS a également contribué à des rencontres de haut niveau tels que le Forum diplomatique d’Antalya et la Conférence de Munich sur la sécurité, et a transmis des informations au Comité politique de l’OTAN ainsi qu’au personnel du bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel.

La Suède, l’un des principaux partenaires de développement de l’ISS, cherche à renforcer son approche régionale du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest. « L’ISS a contribué à éclairer les décisions stratégiques de la Suède en matière de coopération régionale au développement dans l’environnement complexe du Sahel », déclare Camilla Bengtsson, responsable de la Coopération au développement à l’ambassade de Suède à Bamako, au Mali, et ancienne responsable de la coopération régionale au développement à l’ambassade de Suède à Addis-Abeba.

« Comprendre le contexte est essentiel pour une coopération fructueuse en matière de développement. L’ISS a toujours fourni des analyses politiques et sécuritaires au personnel de l’ambassade, aux parlementaires en visite et à notre ministère des Affaires étrangères, ce qui permet aux décideurs suédois de mieux comprendre la situation. »

Pour plus d’informations, veuillez contacter :

Fahiraman Rodrigue Kone, ISS : [email protected]

Lisez le nouveau rapport de l’ISS « Repenser la gestion des changements anticonstitutionnels de gouvernement en Afrique de l’Ouest » ici.

Partenaires de développement
L’ISS tient à remercier les membres du Forum de partenariat de l’Institut, notamment la Fondation Hanns Seidel, l’Open Society Foundations, l’Union européenne, ainsi que les gouvernements du Danemark, de l’Irlande, de la Norvège, des Pays-Bas et de la Suède.
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