COP africaine sur le climat : le compte à rebours a commencé

En Égypte, le financement de la lutte contre le changement climatique doit figurer en tête de l’ordre du jour de la COP27.

La COP africaine sur le climat approche à grands pas. La 27e conférence des parties (COP27) à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques débute le 6 novembre en Égypte. Au menu, deux semaines de négociations intenses et musclées, au cours desquelles les différents groupes d’intérêt feront des pieds et des mains pour parvenir à une déclaration finale le 18 novembre.

Le monde en développement, en particulier l’Afrique, a clairement indiqué que le financement du climat était une priorité. Il s’agit de coupler un mouvement plus important sur le financement de l’atténuation à une augmentation exponentielle du financement de l’adaptation.

Ce sont des priorités essentielles pour les nombreux pays très vulnérables aux effets du changement climatique, comme en témoignent les « bombes de pluie » dans la province du KwaZulu-Natal en Afrique du Sud, les inondations au Pakistan et la sécheresse dévastatrice dans la Corne de l’Afrique.

De nombreux pays sont confrontés à la récession et l’escalade de la guerre en Europe a des répercussions dans le monde entier. Dans le même temps, de grandes régions du monde sont au bord d’une crise énergétique. Ces multiples problématiques font peser un risque élevé à la COP27, qui pourrait se retrouver dans une impasse concernant le financement du climat. Mais en cas de réussite des négociations, l’Afrique pourra-t-elle sortir du lot et prospérer en tant que continent résilient en matière de changement climatique ?

Le risque est grand d’une impasse sur le financement du climat lors de la COP27 de novembre en Égypte

L’Égypte, pays hôte de la COP27, a organisé en septembre une réunion des ministres africains des Finances, de l’Économie, du Développement et de l’Environnement, « pour rappeler les engagements non tenus qui ont laissé les pays africains être frappés de manière démesurée par le changement climatique ». Cette déclaration fait écho à la position de l’Afrique du Sud sur les obligations incombant aux pays développés.

En septembre, le ministre égyptien des Affaires étrangères et président désigné de la COP27, M. Shoukry, a appelé les États à tenir leurs engagements financiers relatifs à la lutte contre le changement climatique et a déclaré que l’objectif était de faire de cette conférence une « COP de mise en œuvre ». Il a souligné la nécessité de coopérer et l’urgence avec laquelle il faut « sauver des vies et des moyens de subsistance ». Lors d’un récent séminaire de l’Institut d’études de sécurité (ISS), l’ambassadeur d’Égypte en Afrique du Sud, M. Ahmed El Fadly, a réaffirmé que la présidence égyptienne à venir envisageait la COP27 « comme un moment de transformation de l’action climatique ».

Les attentes à l’égard de la conférence sont élevées, et les défis sont immenses. À l’approche de la COP26, l’année dernière, une encourageante convergence de vues avait dominé l’Assemblée générale des Nations unies de 2021, avec de forts appels à reconstruire mieux et de manière plus écologique.

En comparaison, la route vers la COP27 est beaucoup plus chaotique. La crise énergétique et le retour malheureux de l’Europe aux combustibles fossiles pour assurer sa sécurité énergétique en sont un des facteurs. D’autre part, les États-Unis font pression pour une plus grande disponibilité du pétrole, critiquant la dernière décision de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole de limiter leur production. Il y a également les messages décourageants de Liz Truss, Première ministre du Royaume-Uni, à propos des groupes environnementaux qu’elle met tous dans le même sac, celui d’une « coalition anti-croissance ».

Si les négociations sur le financement du climat aboutissent, l’Afrique pourra-t-elle sortir du lot comme continent résilient ?

C’est dans ce contexte que la COP27 doit se dérouler et aboutir. Au moins certaines cartes importantes peuvent être jouées avec une chance raisonnable de succès. L’une d’entre elles est le partenariat entre pays développés et pays en développement pour une transition énergétique juste : les JETP (Just Energy Transition Partnerships). Le JETP de l’Afrique du Sud avec l’Union européenne, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France et les États-Unis – destiné à débloquer 8,5 milliards de dollars d’investissements, de prêts et de subventions pour la décarbonation de l’Afrique du Sud – est un projet pilote essentiel à l’échelle mondiale.

Plusieurs pays en développement, dont l’Indonésie, le Nigeria, l’Inde et le Vietnam, ont rejoint la file d’attente pour former de nouveaux partenariats mondiaux pour la décarbonation. Et les déclarations fermes de tous les dirigeants participant à la réunion pré-COP27 d’octobre à Kinshasa ont fait écho aux appels du Secrétaire général des Nations unies, M. António Guterres, et par la vice-secrétaire générale, Mme Amina Mohammed. Tous deux ont demandé une augmentation du financement climatique en général et de celui de l’adaptation aux changements climatiques en particulier.

Il y a de bonnes chances que la COP27 crée un élan politique suffisant pour parvenir à un futur accord mondial significatif sur le climat. La question clé est de savoir si l’Afrique a suffisamment de capacités pour bénéficier de tout mouvement positif. L’ISS a commencé à se pencher sur cette question et propose d’importants éclairages dans un nouveau rapport sur le positionnement de l’Afrique dans les négociations mondiales sur le changement climatique.

D’abord, l’Afrique a été la première au monde à mettre en place une structure de gouvernance de niveau présidentiel, à savoir le Comité des chefs d’État et de gouvernement africains sur le changement climatique. Ensuite, le continent dispose d’un groupe de négociateurs africains sur le changement climatique très fonctionnel et qui gagne en importance. Enfin, le Conseil des ministres africains de l’Environnement est au cœur de la position de négociation du continent.

Un réseau africain de climatologues se met en place pour prendre de meilleures décisions sur une croissance sobre en émissions de carbone

Si le fait de disposer d’une orientation à l’échelle de l’Afrique constitue indéniablement un avantage, la mise en œuvre se fait en revanche sur le terrain. Il est essentiel de créer des répliques de la structure de gouvernance de l’Union africaine à l’échelle régionale, nationale et infranationale. Par exemple, des mécanismes de contrat social tels que la Commission présidentielle sur le climat, en Afrique du Sud, sont en cours d’implantation ailleurs en Afrique. Et un réseau africain de climatologues s’organise afin d’améliorer la prise de décisions sur une voie de développement africain à forte croissance et sobre en émissions de carbone.

Les défis de la COVID-19 et les fréquents événements météorologiques extrêmes précipités par le changement climatique ont introduit des chocs calamiteux en Afrique. L’impossibilité d’utiliser ses ressources en combustibles fossiles représente un défi supplémentaire et un dilemme de plus pour le continent.

Une issue positive de la COP27 – l’Afrique donnant la priorité aux partenariats d’investissement sobres en carbone et au renforcement du libre-arbitre et des capacités – serait un coup de pouce bienvenu. Elle pourrait inciter le continent à s’engager dans une trajectoire d’industrialisation à faible intensité de carbone et servir de catalyseur à une économie mondiale sobre. Après tout, selon les mots de Pline l’Ancien, « Ex Africa semper aliquid novi » : « Il vient toujours quelque chose de nouveau de l’Afrique ».

Dhesigen Naidoo, associé de recherche principale, ISS Pretoria

Image : © AFP

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